samedi 26 mai 2012

Les Tunisiens vont un jour regretter Ben Ali

Tout d'abord nous ne partageons pas la totalité de cet article, loin s'en faut, cependant, il est intéressant de constater que finalement ses révolutions dites populaires et démocratiques ne sont qu'une énième farce, une arnaque de plus, et c'est sous la plume d'un journaliste tunisien, pourtant assez critique quand même, que va se manifester la nostalgie de Ben Ali, tout comme les libyens l'ont déjà du martyr Maâmar El Gueddefi, Dieu ait son âme


Il n’y a pas que le chanteur Slah Mosbah pour penser que c’était mieux sous Ben Ali. Beaucoup de Tunisiens le pensent désormais aussi, dont l’auteur de cet article.

Par Karim Ben Slimane*

Le chanteur Slah Mosbah invité du talk-show ‘‘Labes’’ de la chaîne Attounissia a rendu un vibrant hommage au président déchu, Ben Ali. La gratitude de Mosbah, il l’explique par le soutien qu’il a reçu de l’ancien président qui a contribué à le libérer de prison dans une affaire dans laquelle le chanteur s’estime innocent. J’aimerai remercier Slah Mosbah car il a osé libérer une parole que j’estime pleine de bon sens. Moi aussi je pense que c’était mieux sou Ben Ali, et là-dessus, j’ai mes raisons.

Sous Ben Ali, la vie politique était simple: un seul parti et toujours les mêmes têtes. Après Ben Ali, il y a une centaine de partie et j’avoue que j’ai du mal à retenir tous les noms des nouveaux apprentis politicards qui sont certes novices dans la vie politique mais j’ai bien le sentiment qu’ils excellent eux aussi dans la langue de bois et dans le carriérisme.

Sous Ben Ali, quand j’avais besoin d’un passe-droit, je savais à qui m’adresser. Après Ben Ali, l’administration est devenue tellement gangrénée par la corruption qu’il faut arroser un tas de gens pour arriver à ses fins. Autant dire que mon budget pot-de-vin a augmenté depuis la révolution de la dignité.

Sous Ben Ali, je pouvais tranquillement m’adonner à mon plaisir coupable de siroter notre bière nationale à la terrasse d’un bar au soleil. Après Ben Ali j’avoue que je bois plus par dépit que pour le plaisir. J’ai même l’impression que le goût de la Celtia s’est affadi. Cet instant magique où je refaisais le monde avec mes compagnons de fortune et que la Celtia, capiteuse et généreuse, me rehaussait et propulsait aux confins du nirvana s’est enlaidit. L’atmosphère a beaucoup changé dans mon bar. Le serveur, parfait bigot, commence à avoir des remords quant à son gagne-pain pas tout à fait halal. Le patron, lui, craint une visite impromptue de la nouvelle police de l’esprit qui a oublié qu’on buvait à Bagdad sous le règne de Haroun Errachid, l’âge d’or de l’islam.

Sous Ben Ali, nous étions tous musulmans. Après Ben Ali, nous sommes devenus musulmans avec épithète: salafiste piétiste, salafiste jihadiste, ashâarite, hanbalite et la liste est encore longue. Souvent, je ne comprends pas la moitié de ces étiquettes et honnêtement ça ne change rien à ma vie mais apparemment je suis le seul. Deux imminents cheikhs se sont livrés à une joute oratoire, sur les ondes d’une radio nationale, d’une grande intensité qui a suscité en moi un sentiment mitigé d’hilarité et de confusion. L’un des deux cheiks ne reculant devant rien a traité son interlocuteur de musulman habachi lui demandant de se repentir séance tenante sous peine d’excommunication. Autant vous dire qu’hier j’ai dormi moins bête puisque ma liste d’épithètes pour musulmans s’est enrichie (sic !) du peu glorieux habachisme.

Sous Ben Ali, chaque vendredi je déposais mon père et notre voisin à la même mosquée et ce depuis que j’ai acquis le droit de conduire la voiture familiale, un bijou de la mécanique des années soixante-dix. Après Ben Ali, chaque vendredi, les deux amis de trente ans passent une demi-heure avant d’arrêter le choix de la mosquée pour écouter le prêche. La discussion qui me laisse pantois, à chaque fois, s’engage sur les qualités et les défauts de l’imam. Chacun y va de son argument pour encenser ou vilipender l’imam de telle où telle autre mosquée. Souvent les deux amis de trente ans ne se mettent pas d’accord et chacun part de son côté vers une mosquée différente. Je ne savais pas qu’il y avait autant de mosquée dans ma ville.

Enfin, voilà, je remercie encore une fois Slah Mosbah pour avoir libéré ma parole pour vous dire à quel point c’était mieux sous Ben Ali. Toutefois, et contrairement à Slah Mosbah, moi je le dis avec humour.

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